Michel R. Campbell Ph.D.

Membre de l’Ordre des psychologues du Québec

L'agoraphobie

Agora vient du grec et veut dire «grande place». Phobie vient également du grec et veut dire «crainte». L'agoraphobie est la peur ou la crainte excessive des grands espaces et des lieux publics.

Le Dr Jean-Marie Boisvert, chercheur en psychologie à l'Université Laval, donne une définition un peu plus large de l'agoraphobie : «L'agoraphobie est une peur d'être loin d'un endroit ou d'une personne qui procure une sécurité psychologique.

Cet endroit est d'ordinaire le domicile de la personne, mais peut aussi être l'auto, le lieu de travail, et cetera. La personne sécurisante est d'ordinaire le conjoint, un parent ou un ami à qui l'agoraphobe a révélé son problème.» Lorsque la peur devient très intense, la personne peut chercher à éviter les foules, les tunnels, les ponts, les ascenseurs, les espaces libres, les transports publics et même les rencontres sociales. Nul doute que l'agoraphobie est la plus invalidante des phobies.

La prévalence

Près de 8% de la population est affectée par différents types de phobies et l'agoraphobie est la plus fréquente des phobies. Certains spécialistes vont jusqu'à dire que 50% des phobiques sont victimes de l'agoraphobie, d'autres prétendent qu'une personne sur 160 est aux prises avec ce problème. L'agoraphobie survient généralement entre 18 et 35 ans, mais je constate qu'elle est de plus en plus présente chez les personnes âgées. Par ailleurs, comme dans le cas des attaques de panique, 80% des agoraphobes sont des femmes et la plupart d'entre elles sont mariées.

Le tableau clinique

Comme dans le cas des autres phobies, la peur cause des réactions physiologiques comme des étourdissements, des palpitations cardiaques, des difficultés respiratoires, des nausées, des faiblesses ou tensions musculaires, de la sudation, la bouche sèche, et cetera. Au niveau de la pensée, la personne peut avoir peur de perdre le contrôle, de devenir fou ou folle et surtout d'être humiliée publiquement. Elle peut aussi avoir peur de s'évanouir ou de mourir. Par conséquent, elle aura tendance à éviter tout endroit anxiogène ou associé à ses réactions physiques. À cet effet, je me souviens d'une dame qui avait tellement peur de sortir de chez elle que j'ai dû la traiter à son domicile.

Plusieurs agoraphobes ont des problèmes connexes. Afin d'éviter la rechute, il faudra, par exemple, combler les lacunes au niveau des habiletés sociales ou leur apprendre à s'affirmer tout en diminuant la peur des conflits interpersonnels, ou encore, les aider avec «la peur d'avoir peur», une réaction courante chez les agoraphobes. Certaines recherches suggèrent que les problèmes conjugaux peuvent jouer un rôle important dans le développement et le maintien de l'agoraphobie. Ainsi, une thérapie conjugale peut être indiquée.

Comment se développe l'agoraphobie?

Il n'y a pas de scénario universel. Pour Julie, l'agoraphobie s'est développée suite à un événement traumatisant; elle avait été témoin d'un hold-up dans une banque. Par la suite, ses peurs se sont généralisées aux centres commerciaux et aux stations de métro. Hélène, pour sa part, était très orgueilleuse et sensible à l'opinion d'autrui. Un bon jour, elle a été victime d'un malaise dans un restaurant. Elle a eu tellement peur de s'évanouir et d'être humiliée publiquement, qu'elle s'est mise à éviter systématiquement les lieux publiques. Quant à Claude, il a vécu une période de stress au travail. Il faut dire que durant cette même période, il a eu quelques attaques de panique. Bref, il a réalisé que plus il s'éloignait de chez lui, plus il se sentait tendu.

Le traitement

Le Dr Gilles Gaudette, un chercheur sur l'agoraphobie, a beaucoup vanté les mérites d'un traitement par exposition in vivo. En résumé, ce traitement consiste essentiellement à désensibiliser l'individu face aux situations anxiogènes en l'exposant graduellement aux stimuli phobogènes jusqu'à ce que l'anxiété ressentie initialement se dissipe. Évidemment, avant de passer à l'exposition in vivo, les personnes sont sensibilisées aux causes, au développement et au maintien du problème, et cela, tant au niveau théorique que pratique. En d'autres mots, la personne apprend à connaître les «us et coutumes» de la maladie, si bien qu'elle développe une certaine expertise à l'égard de son problème.

Selon le Dr Gaudette, en l'espace de quelques mois, cette procédure permet d'améliorer de façon notable la situation des agoraphobes. «L'amélioration rapportée varie de 75% À 85% de la condition initiale et les acquis se maintiennent par la suite», explique-t-il. J'ai utilisé cette procédure avec plusieurs personnes et, en effet, elle s'est avérée très efficace. Le traitement est relativement simple, mais, à mon avis, c'est l'art de l'appliquer et la créativité du thérapeute qui fait la différence, car le traitement doit être adapté à la situation personnelle de l'individu.

Site suggéré :

Préparé par le Dr Michel R. Campbell, psychologue et sexologue

Lectures suggérées :
  • Marchand, A., Letarte, A. La peur d'avoir peur. Guide de traitement du trouble panique avec agoraphobie. Éditeur : Stanke Alain, 2001

Préparé par le Dr Michel R. Campbell, psychologue et sexologue

N.B. Le but de cet article est d'informer le lecteur concernant les caractéristiques associées à une maladie mentale. Seulement un professionnel de la santé qualifié peut évaluer ce genre de maladie.

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