Michel R. Campbell Ph.D.

Membre de l’Ordre des psychologues du Québec

La personnalité évitante

Les personnes qui ont un trouble de la personnalité évitante sont très timides et surtout hypersensibles aux critiques, si bien qu'elles évitent de développer des relations interpersonnelles. Elles ont donc peur de ne pas être à la hauteur et elles sont généralement tendues dans des situations sociales. De plus, ces personnes ont tendance à être déprimées ou dysthymiques, ou si vous préférez, elles ont tendance à être maussades.

Les caractéristiques

Ces personnes évitent systématiquement les activités sociales et professionnelles qui comprennent des contacts interpersonnels avec les autres, car elles ont une peur morbide d'être critiquées, désapprouvées ou rejetées. Elles accepteront de s'impliquer seulement si elles sont convaincues qu'elles ne seront pas rejetées. Par contre, elles souhaitent de l'amitié et de l'affection. Cependant, l'anxiété causée par la peur du rejet outrepasse leurs besoins affectifs de base. Ce problème diffère de l'anxiété sociale, ou si vous préférez, la peur de parler en public ou l'incapacité d'uriner dans une toilette publique, ou encore, la peur de s'étouffer en mangeant en face d'autrui, puisqu'il englobe la personnalité de l'individu. Par contre, les personnes ayant une personnalité évitante peuvent être fonctionnelles au niveau du travail, si, bien entendu, la situation requiert peu d'interactions sociales.

L'intimité

Ces personnes ont généralement d'importantes difficultés au niveau de la relation amoureuse, car elles ont peur de se confier par crainte d'être ridiculisées, ou encore, d'être exposées à la honte. Lorsqu'on demande leur opinion sur un sujet, elles sont peu loquaces et la réponse est souvent limitée à " Je ne sais pas " ou encore la réponse est courte « oui ou non ». Ainsi, dans le contexte d'une relation amoureuse, le conjoint se plaint souvent d'un manque d'intimité et de communication. Côté sexuel, ces personnes ont souvent tendance à être réservées et peu créatives. Elles sont perçues comme des personnes qui ont un complexe d'infériorité, ou encore, qui sont socialement incompétentes. Ainsi, elles ont forcément tendance à être solitaires.

Le cas de François

François a été dirigé à nos bureaux par son parrain du Mouvement alcoolique anonyme. Il avait passé une bonne partie de son adolescence et de sa vie adulte sur la brosse. D'ailleurs, il a rencontré son épouse alors qu'ils étaient « sur le party ». Elle le croyait extraverti. Avant les sorties, il prenait un bon coup, ce qui lui donnait du courage. Il était perçu comme le bouffon du groupe. En fait, c'est l'alcool qui changeait sa personnalité. Sous son influence, il se foutait de l'opinion des autres, en plus d'afficher une façade de confiance en soi et de jovialité. « Crois-moi, lorsque j'étais gommé, il n'y avait rien à mon épreuve », me disait-il.

À l'âge de trente ans, il a décidé de cesser de boire pour réaliser qu'il avait un problème au niveau des relations interpersonnelles. Lorsqu'il était à jeun, il était incapable d'endurer la critique ou toute forme de rejet. Son insécurité sociale et sa peur de mal paraître faisaient en sorte qu'il se repliait sur lui-même tout en évitant de donner son opinion.

Les interventions

Les personnes ayant ce type de problème croient que leur interprétation de la réalité est juste. Les interventions les aident, entre autres, à identifier ce qu'ils se disent pour créer autant d'anxiété. Par exemple, les autoverbalisations dénigrantes, exagérées, sévères ou rigides créent un contexte d'anxiété, et par conséquent, d'évitement. Lorsqu'ils réalisent comment ils interprètent fautivement la réalité sociale, ils sont plus en mesure d'apporter des correctifs.

François a réalisé qu'il se disait : « Il faut absolument que tout le monde m'aime, sans cela, c'est extrêmement grave. » « Je ne dois jamais dire de stupidité, sans quoi, les autres ne voudront plus de moi. » « M'isoler, c'est mieux que de risquer que les autres me blessent. » « Une critique correspond à une condamnation massive. » Le traitement comprend plusieurs types d'interventions et il peut s'échelonner sur plus d'un an.

Caractéristiques diagnostiques du trouble de la personnalité évitante (voir le Manuel de diagnostic et statistique des troubles mentaux, DSM-IV, 1996)

La personne fonctionne sur un mode général d'inhibition sociale (donc évitement), de sentiments de ne pas être à la hauteur dans un contexte social ou interpersonnel. Il y a de l'hypersensibilité au jugement négatif d'autrui. Ce malaise apparaît au début de l'âge adulte et est présent dans des contextes divers, comme en témoignent au moins quatre des manifestations suivantes :

  1. le sujet évite les activités sociales professionnelles qui impliquent des contacts importants avec autrui par peur d'être critiqué, désapprouvé ou rejeté
  2. réticence à s'impliquer avec autrui à moins d'être certain d'être aimé ou apprécié
  3. est réservé dans les relations intimes par peur d'être exposé à la honte et au ridicule
  4. craint d'être critiqué ou rejeté dans les situations sociales ou interpersonnelles
  5. est inhibé dans les situations interpersonnelles nouvelles à cause d'un sentiment de ne pas être à la hauteur
  6. se perçoit comme socialement incompétent, sans attrait ou inférieur aux autres
  7. est particulièrement réticent à prendre des risques personnels ou à s'engager dans de nouvelles activités par peur d'éprouver de l'embarras

Référence internet:

Bibliographie :

  • American Psychiatric association, DSM-IV, Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux. Traduction française, Paris, Masson, 1996.Beck, J.S., Cognitive Therapy of personnality Disorders in P. M. Salkovskis, Frontiers of Cognitive Therapy, Guilford Press, 1996.Cottraux, J. et Blackburn, I.M.. Thérapies cognitives des troubles de la personnalité. Masson, 1995.
  • Cousineau, P., L'approche cognitive et les troubles de la personnalité dans la Revue québécoise de psychologie, vol. 16, no 2, 1995.McGinn, L.K. and Young, J.E., Schema-Focused Therapy in P. M. Salkovskis, Frontiers of Cognitive Therapy, Guilford Press, 1996. Stein, D.J., Young J.E., Schema Approach to Personnality Disorders, dans D.J. Stein, J.E. Young, Cognitive Science and Clinical Disorders, Academic press, 1992.
  • **Young, J.E. et Klosko, J.S., Je réinvente ma vie, Les Éditions de l'Homme, 1995 (version anglaise 1993).

Préparé par le Dr Michel R. Campbell, psychologue et sexologue

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N.B. Le but de cet article est d'informer le lecteur concernant les caractéristiques associées à une maladie mentale. Seulement un professionnel de la santé qualifié peut évaluer ce genre de maladie.

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