Michel R. Campbell Ph.D.

Membre de l’Ordre des psychologues du Québec

La personnalité dépendante

Les spécialistes ont identifié dix troubles de la personnalité divisés en trois groupes. Le premier groupe comprend la personnalité paranoïaque, schizoïde et schizotypique. Les personnes ayant ce type de difficulté sont généralement renfermées, elles paraissent froides, suspicieuses et elles sont souvent perçues comme étranges ou bizarres.

Le deuxième groupe comprend la personnalité antisociale, borderline, histrionique et narcissique. Les personnes appartenant à ce groupe sont généralement très émotives ou hyperexpressives, elles essaient constamment d'attirer l'attention, elles sont d'une humeur instable ou elles changent rapidement d'humeur, en plus d'être superficielles.

Le troisième groupe comprend la personnalité évitante, obsessionnelle-compulsive et dépendante. Les personnes ayant ce genre de trouble ont tendance à être anxieuses et tendues, et elles sont hypercontrôlantes.

Les caractéristiques

Les personnes ayant une personnalité dépendante ont un grand besoin d'être prises en main, elles sont généralement soumises et elles sont perçues comme " collantes ". De plus, elles ont une peur morbide de la séparation, si bien qu'elles font à peu près tout pour l'éviter. Ces personnes sont donc vulnérables à la manipulation et à l'exploitation. Déjà durant l'enfance, il est possible d'observer certains traits associés à la personnalité dépendante. Toutefois, le diagnostic se pose à l'âge adulte. Comme dans la plupart des troubles de personnalité, cette difficulté est persistante et elle cause une souffrance significative. En général, elle affecte tant le fonctionnement social que professionnel.

Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, le DSM-IV, décrit les caractéristiques de ce problème comme suit :

Un besoin général et excessif d'être pris en charge qui conduit à un comportement soumis et "collant" et à une peur de la séparation, qui apparaît au début de l'âge adulte et est présent dans des contextes divers, comme en témoignent au moins cinq des manifestations suivantes:

(1) le sujet a du mal à prendre des décisions dans la vie courante sans être rassuré ou conseillé de manière excessive par autrui

(2) a besoin que d'autres assument les responsabilités dans la plupart des domaines importants de sa vie

(3) a du mal à exprimer un désaccord avec autrui de peur de perdre son soutien ou son approbation. NB: ne pas tenir compte d'une crainte réaliste de sanctions

(4) a du mal à initier des projets ou à faire des choses seul (par manque de confiance en son propre jugement ou en ses propres capacités plutôt que par manque de motivation ou d'énergie)

(5) cherche à outrance à obtenir le soutien et l'appui d'autrui, au point de faire volontairement des choses désagréables

(6) se sent mal à l'aise ou impuissant quand il est seul par crainte exagérée d'être incapable de se débrouiller

(7) lorsqu'une relation proche se termine, cherche de manière urgente une autre relation qui puisse assurer les soins et le soutien dont il a besoin

(8) est préoccupé de manière irréaliste par la crainte d'être laissé à se débrouiller seul

La personnalité dépendante coexiste souvent avec d'autres problèmes de personnalité et de l'humeur difficiles à distinguer. Le degré selon lequel des comportements dépendants sont considérés comme adaptés varie selon l'âge et le groupe socioculturel.

Le cas d'Antoine

Antoine est une personne qui a du mal à prendre des décisions sans être rassuré ou conseillé d'une manière excessive par autrui. Il a besoin que sa conjointe assume ses responsabilités dans la plupart des domaines importants de sa vie. Il a peur de s'affirmer, car il croit qu'il sera automatiquement rejeté. Il a donc une peur maladive de perdre l'approbation, le soutien et surtout l'amour d'autrui. De plus, il prend rarement l'initiative dans les projets, car il a un manque flagrant de confiance en soi. Aussi, il ne croit pas en ses capacités personnelles ni en son jugement. Il ne fait rien sans être accompagné de son épouse. Elle est venue en consultation pour un problème conjugal, alors que le problème de fond est un trouble de personnalité.

Le cas de Carole

À la suite de ses problèmes judiciaires, Carole m'a été recommandée par son avocate. Son copain l'avait manipulée dans une histoire d'importation illicite de drogue. Il faut dire que les personnalités dépendantes sont très influençables et par le fait même très vulnérables. Il avait, semble-t-il, des difficultés financières et il devait une somme importante à un usurier. Lors d'un voyage, il l'aurait convaincue de camoufler de la drogue dans ses effets personnels. Évidemment, elle s'est fait prendre. Pour éviter de perdre son amour, elle était prête à tout; il l'avait convaincue de devenir danseuse, puis " call-girl ". Carole avait excessivement peur de se retrouver seule et elle croyait qu'elle serait incapable de se débrouiller. La solitude était évidemment sa hantise, si bien qu'elle choisissait le premier venu, souvent un truand.

La dépendance affective

Les individus qui se décrivent comment des dépendants affectifs présentent souvent les caractéristiques d'un trouble de personnalité dépendante. Ainsi, le manque d'autonomie au niveau des relations amoureuses caractérise souvent ces personnes, mais au fond, la plupart du temps, ce manque d'autonomie est généralisé à d'autres secteurs de la vie. Évidemment, sur le plan affectif, ces individus ont peur d'être abandonnés ou de se retrouver seuls. Ces personnes ont également tendance à vivre de la jalousie romantique et de la possessivité.

Les interventions

Inutile de vous dire que les interventions ont pour objectif de développer l'autonomie, la confiance en soi, les habiletés sociales, et vaincre la peur de la solitude. Pour mieux surmonter ce type de problème, à mon avis, il faut d'abord bien le comprendre, cela veut dire bien connaître les causes et les effets tant sur soi que sur l'entourage. Certains exercices sont généralement structurés pour améliorer le niveau de confiance en soi et d'estime de soi pour en arriver à une plus grande autonomie.

Liens suggérés :

Lectures suggérées :

  • American Psychiatric association, DSM-IV, Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux. Traduction française, Paris, Masson, 1996.
  • Beck, J.S., Cognitive Therapy of personnality Disorders in P. M. Salkovskis, Frontiers of Cognitive Therapy, Guilford Press, 1996.
  • Cottraux, J. et Blackburn, I.M.. Thérapies cognitives des troubles de la personnalité. Masson, 1995.
  • Cousineau, P., L'approche cognitive et les troubles de la personnalité dans la Revue québécoise de psychologie, vol. 16, no 2, 1995.
  • McGinn, L.K. and Young, J.E., Schema-Focused Therapy in P. M. Salkovskis, Frontiers of Cognitive Therapy, Guilford Press, 1996.
  • Stein, D.J., Young J.E., Schema Approach to Personnality Disorders, dans D.J. Stein, J.E. Young, Cognitive Science and Clinical Disorders, Academic press, 1992.
  • ***Young, J.E. et Klosko, J.S., Je réinvente ma vie, Les Éditions de l'Homme, 1995 (version anglaise 1993).
  • Féline A., Guelfi J.D., Hardy P. Les troubles de la personnalité. Flammarion : Médecine-Sciences éd., Paris, 2002.

Préparé par le Dr Michel R. Campbell, psychologue et sexologue

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N.B. Le but de cet article est d'informer le lecteur concernant les caractéristiques associées à une maladie mentale. Seulement un professionnel de la santé qualifié peut évaluer ce genre de maladie.

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